Valérie Pécresse et la région Île-de-France veut utiliser le « droit de saisine » créé par la loi 3DS, qui permet à une collectivité de demander à l’État de nouvelles compétences. Elle va proposer au vote du Conseil régional une délibération pour « un choc de décentralisation en Île-de-France ». Elle propose une quarantaine de mesures, notamment sur l’École. Le document de 150 pages est très élaboré. Par exemple, il contient des propositions de modifications du code de l’éducation pour permettre juridiquement les transferts de compétences. Elle résume ainsi son projet pour l’École « Face à l’incapacité de l’État à recruter des enseignants et à remettre sur pied l’Éducation nationale, nous demandons une véritable gouvernance partagée du système éducatif ».
Tout d’abord, sur le recrutement, lorsqu’on connaît la situation des personnels de la région, Valérie donne une belle illustration de l’expression populaire voir la paille dans l’œil du voisin et ne pas voir la poutre dans le sien. Simple exemple, au LP Perret (Évry-Courcouronnes), le mardi 3 septembre, à force d’arrêts maladies non-remplacés, il n’y avait aucun agent d’entretien. Sur la question du remplacement, le lycée est resté sans réponse de la région pendant plusieurs jours. Les difficultés de recrutement sont telles, que le recours à des agences d’intérim est devenu fréquent.
Rappelons aussi qu’en 2021, la Cour Régionale des Comptes avait tapé sur les doigts de Valérie Pécresse, lui reprochant, un manque de visibilité sur les travaux prévus dans les lycées et, avec la création de ses Équipes Mobiles de Sécurité, des dépenses, en dehors de son champ de compétence.
La région veut réclamer « le droit de créer des écoles primaires régionales sous contrat avec l’État dans les quartiers prioritaires de la ville, avec une liberté et une autonomie assumée dans le recrutement des enseignants et le projet pédagogique ».
On retrouve ici la logique de « L’École du futur », l’expérimentation marseillaise de Macron, des écoles avec un projet d’établissement spécifique et, notamment, la possibilité pour la direction de participer au choix de son équipe. Il est notable que, dans le programme Pécresse cette autonomie pourrait concerner aussi le « recrutement » des élèves et donner une large place aux parents d’élèves.
Macron voulait recruter des « professeurs associés » en LP, elle envisage d’élargir la mesure au lycées généraux et technologiques. Pécresse étale son mépris du métier enseignant : « en fin de carrière, certains actifs pourraient souhaiter se reconvertir sur des postes d’enseignants en filières technologiques ou professionnelles ». Elle réclame aussi la possibilité pour la Région de fixer la composition des conseils d’administration des LGT.
Pécresse veut faire main basse sur les lycées professionnels, elle en réclame la régionalisation totale ! Elle revendique « une décentralisation des règles de gouvernance des lycées professionnels, qui ne relèveront plus du Code de l’éducation mais du pouvoir réglementaire local ». Elle veut pouvoir recruter, gérer et former les personnels de l’éducation selon des modalités équivalentes aux transferts des personnels TOS en 2004.
Sur la carte des formations, elle s’inscrit dans la réforme Macron du LP. Elle veut fermer des filières qui ne garantissent pas une intégration réussie dans le monde du travail et adapter la carte aux besoins d’embauches immédiats des entreprises. Elle cible les filières tertiaires (gestion-administration, commerce et vente) qui sont, selon elle, « prépondérantes dans l’offre de formation, alors que ces dernières présentent de faibles taux d’insertion ». Mais elle veut aller encore plus vite que Macron et « construire un système flexible » en supprimant la tutelle Éducation Nationale. Elle veut avoir le pilotage complet de l’évolution de la carte des formations professionnelles initiales et sur les capacités d’accueil des différentes filières.
On peut espérer que cette saisine n’est en grande partie qu’un coup politique. Le CESER dans son avis pointe l’absence d’étude d’impact. Cependant, l’État a l’obligation de répondre dans un délai d’un an. La CGT Éduc’action s’oppose à cette vision de l’École qui veut aller toujours plus loin dans l’adaptation aux seuls besoins économiques. Nous combattrons ce projet réactionnaire qu’il vienne de Macron ou de Pécresse !
Yannick Biliec
SG CGT Educ’action 91