L’entreprise, un lieu de formation… Vraiment ?

L'entreprise, un lieu de formation

Le mythe de l’entreprise formatrice

Macron veut : allonger les PFMP de 50 % pour les terminales qui veulent s’insérer au détriment de l’enseignement disciplinaire ; confier les décrocheur·euses à des mentors et encore envoyer les enseignant·es du professionnel s’y former tous les trois ans. Le fond idéologique de la réforme est toujours le même : l’entreprise ferait mieux que l’École pour former et insérer. Alors, l’entreprise est-elle vraiment un lieu de formation de qualité et sans danger ? Et permet-elle une meilleure insertion ?

PFMP : le parcours du combattant

Présenter les PFMP comme l’alpha et l’oméga de la formation professionnelle, sous couvert que le LP serait éloigné de l’entreprise est un mensonge. En effet les PFMP sont :

  • difficiles à trouver ;
  • discriminantes ;
  • dépendantes de la conjoncture économique ;
  • pas toujours bien encadrées ;
  • aux tâches demandées répétitives.

Témoignages

« Ce sont des bébés qui se retrouvent à travailler 35 heures par semaine, déplore Farida, professeure de vente dans un lycée professionnel parisien. Sans compter que ce sont des élèves fragiles, qui n’ont pas les codes pour se vendre et qui finissent dans une petite boutique en bas de chez eux à ranger des boîtes de conserve au lieu de faire un stage correspondant à leur formation. Ils auront appris quoi à la fin ? Rien. » C’est d’ailleurs le bilan que fait Andy, 23 ans, de ces périodes de stages lissées sur ses trois années de bac professionnel commerce à Sceaux, dans les Hauts-de-Seine. « Ça a été horrible à chaque fois. Je n’étais jamais encadré et soit je ne faisais rien, caché dans les remises, soit on me demandait de faire le sale boulot que personne ne voulait faire. » Autrement dit, porter les cartons les plus lourds, étiqueter des produits, faire le ménage, parfois même nettoyer les toilettes, lui qui espérait apprendre tous les aspects du marketing et de la vente […]. »

« Les stages, parents pauvres des lycées professionnels », Libération, 6 mai 2023.

Les dangers de l’entreprise

En 2019, l’Assurance maladie a recensé 10 301 accidents du travail d’apprenti·es (1 par heure). À cela s’ajoutent 3 110 accidents de trajet. Au total 15 morts dont 12 sur les trajets ! Les apprenti·es représentent 50 % des accidents de travail des salarié·es de moins de 20 ans. Cette surreprésentation des apprenti·es dans les accidents du travail n’est pas liée à des conduites à risques, mais bien aux conditions de travail.

L’exposition aux risques

Les apprenti·es et stagiaires sont particulièrement exposé·es aux produits cancérogènes chimiques (24 % d’exposé·es). 27 % d’entre eux·elles travaillent dans deux des cinq domaines les plus « exposants », le BTP et la mécanique-travail des métaux.

Les VSST

Il n’y a pas de données en France sur les violences sexistes et sexuelles sur les apprenti·es, mais l’étude du syndicat Suisse UNIA est alarmante : sur 800 apprenti·es au début de 2019 : 33 % des personnes interrogées ont déjà été harcelées sexuellement sur le lieu de travail.

« Les formes de harcèlement les plus fréquentes au travail sont les allusions sexuelles ou les remarques désobligeantes (200 personnes). Les contacts physiques inappropriés au travail concernent 95 des sondé·es, 58 apprenti·es ont reçu des invitations non désirées à connotation sexuelle, 54 ont reçu des présentations indésirables, mise à disposition et affichage de matériel pornographique et 9 personnes ont dénoncé avoir vécu une agression sexuelle ou un viol au travail. »

https://www.unia.ch/fr/monde-du-travail/de-a-a-z/apprenti-e-s/sondage-apprentissage
Avec la CGT, disons NON aux violences sexistes et sexuelles au travail

Les VSST dans la restauration

Dans un lycée hôtelier, les élèves témoignent des violences subies pendant leur stage dans de grands restaurants. Pour les un·es, c’est le dénigrement ou l’humiliation, systématique, qui les a marqué·es, pour d’autres le harcèlement. Une élève raconte qu’un chef lui a administré une fessée. Une autre explique que, s’étant penchée vers le sol, on lui a fait des remarques d’ordre sexuel sur sa position. Ce ne sont pas des cas isolés. Le compte Instagram « je dis non, chef » rassemble plus de 200 témoignages. En effet, un chef concède « je reproduisais ce que j’avais vécu », témoignant ainsi que la violence est consubstantielle de l’exercice et de l’apprentissage du métier. L’univers de la restauration se caractérise par une organisation du travail extrêmement hiérarchisée et militarisée, puisqu’on parle de « brigade » et de « coup de feu ». Dans ces conditions, la pression exercée sur les jeunes est maximale.

« Sévices compris : comment se débarrasser des violences en cuisine ? » https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/interception/interception-du-dimanche-18-decembre-2022-5361418

Ces jeunes sont catapulté·es dans la vie professionnelle – un monde d’adultes et hiérarchique – et souvent n’osent pas parler lorsqu’ils·elles sont victimes de harcèlement par crainte de perdre leur place d’apprentissage.

Revendiquons…

  • des études régulières de la DARES et de la DEEP
  • des droits pour protéger les victimes de VSST, avec un protocole de traitement dans le cadre des PFMP
  • une diminution des PFMP pour une augmentation du temps disciplinaire
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